La Muse de l'auteur défendant l'accès de son humble garni aux chasseurs d'autographes.
La Muse de l'auteur défendant l'accès de son humble garni aux chasseurs d'autographes.

 

 

 

Les chansons qui suivent sont, en principe, destinées à être mises en zizique. Si, d'aventure et par extraorindaire, un zizicien égaré en ces limbes, se sentait des vélléités, qu'il ne se gène surtout pas  : qu'il contacte l'innocent qui anime ce site via le formulaire adéquat (comme Sheila)...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La dernière mode

 

Le coloris, la coupe,

Et comment s’affubler,

Tout ça sent l’entourloupe,

La raison saboulée.

Et c’est assez pénible

De voir plébiscités

Ces fats que nous exhibent

La vaine publicité

De leurs thuriféraires :

Leur Moi cyclothymique,

Les tétons faméliques,

Les carcans délétères.

 

Oh! Certes, c'est un débat,
Mais que du taffetas
On passe à du tartan,
Ou que pour faire brillant
On en arrive au strass,
Il demeure un écueil:
Oui, quels que soient nos choix,
On sait qu'on finira
revêtus d'un linceul,
Et puis du temps qui passe…

 

 

 

___________

 

 Les estrangeois !


"Ah! Saint-Denis, Montjoie,
C'qu'y a comme estrangeois !
Moi passé le canton,
C'est muni d'un bâton

Que j'ose sortir le soir
Car je sais trop d'histoires
Ousque des indigènes
Nous tombent sur la couenne."

C'est là une rengaine, qui ainsi que la mer,
Est toujours, oui toujours: toujours recommencée.
Si son ressac charrie quelques trêves éphémères,
C'est pas demain la veille qu'elle aura renoncé !

 

____________

 

Labour, toujours labour !

 

Les soirs d'été, dans les blés murs,
Quoi donc qu'on voit, qui rode en quête
D'on ne sait quoi mais qui inquiète ?
Mais non voyons, pas un lémure,
Pas un renard ni un blaireau
Et pas non plus une affreuse goule :
Non, c'est le fils au gros Paulo,
Qui va chercher une nouvelle poule !

La libido à la cambrousse,
ça se joue dans les herbes rousses.

 

 

 

_________

 

Poème en grandes pompes

 

J'ai retenu une leçon
Pendant ce bel été d'azur :
Pour que vraiment le pied dure
Y faut pas mettre des sandales,
La sandale c'est un scandale !
Et j'ai appris sans façons
qu’en cuisant sous le soleil :
Pour préserver ses orteils,
Faut pas mettre d'espadrilles,
Les orteils, ben ça les vrille !

Pis j'ai compris autre chose,
Pendant qu'il faisait si beau :
Il faut pas mettre de sabots,
Pour les ch'villes c'est pas pratique :
ça leur fait comme des coups d'trique !
Bref j'ai tant et tant appris
Qu'on dirait qu'j'suis pris d'boisson,
Ou bien que j'ai la scoliose
Vu comment  je me tortille.

Oui, passque pour plaire aux dames,
Pour qu'elles m'appellent "mon canard",
Maintenant je porte des palmes,
Et c'que j'ai mal aux panards !

 

 

___________

 

 Pas froid aux aïeux !


Les vieux regardent les jeunes mais les jeunes courent vite,
et l’insolence rit des angoisses prostatiques!
Hélas, on sonne le glas, le glas oui des claouis,
penauds, fripés, patauds et pour tout dire meurtris
qui s'étiolent à conter quelque vague fleurette
plutôt que de sarcler, ou de faire des maquettes.

 

On hésite à admettre qu’au lieu du point de croix,

la matrone alanguie, coquette de surcroît

oublieuse éhontée de son statut d’ancêtre

confesse ses émois ailleurs que chez le prêtre.

Or c’est se fourvoyer, faire œuvre d’ineptie,

Des vieilles intimités supposer l’asepsie :

 

Et le bruit des béquilles, des déambulateurs,

Résonnant à la nuit le long des corridors

Annonce le claquement des gaines de maintien,

Et la renaissance des quéquettes qu’on soutient,

Et les soins à venir pour cause de glissades,

Les foulures, les plâtres, les tonnes de pommades :

 

Et on accusera, encor les canicules

De fatiguer nos vieux, quand tous nos vieux s’en…

Enfin, s’enlacent, quoi !

 

 

 

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Le pilier

 

Je vis ma vie de bar en bar,

Je suis le pote occasionnel

Des causeries de fins d' soirées,

Je hante aussi au hasard

Les cours d' immeubles et les ruelles :

Je suis le spectre des mal barrés.

 

Je suis pilier, voilà ma gloire

Je suis une fête à moi tout seul :

Je défile, je fais la fanfare :

Je fais marrer un tas d' guignols !

 

 

J' ai mon pied à terre au comptoir

D' où je commente l' actualité

D' ailleurs j' ai des entrées partout

Et de l' ONU jusqu' aux terroirs,

Je sais les complots, les secrets :

Je suis un spécialiste de tout !

 

 

Je suis pilier, voilà mon titre

Une sorte de prédicateur

Et je regarde au fond des litres

La France des consommateurs !

 

 

Je n' irai pas en Amérique,

Je verrai jamais la Tamise,

Ni n' tremperai mes pieds dans l'Gange

Mais dans mon verre je me fabrique

Mes propres gondoles à Venise :

Je suis le gondolier de la fange !

 

 

Je suis pilier, voilà ma croix :

J' peux pas m' éloigner d' ma barrique

Mon sacerdoce ne permet pas :

Car je me dois à mon public !

 

 

 

_____________

 

L'amour marinière  (2ème version)


L' une à son champ fut arrachée,

L' autre enlevée à son rocher :

Elles se découvrirent dans l' exil,

La frite et la moule nubile

 

Partagèrent la même palette

à l' arrière d' une camionnette :

Le tubercule conquit la moule

Et la prit dans l’odeur du fioul !

 

 

La moule était vraiment friponne

Et la frite un peu trop canaille

Elles firent l'amour à la nippone

Dans les effluves de poiscaille.

 

Ça tourna bientôt à l’orgie

Et un timide rouget rougit :

Y avait un parfum de scandale

À deux pas de la caisse centrale !

 

Mais les amants libidineux

S’attirèrent des regards haineux :

On les fourra dans un caddie

Entre deux bottes de radis,

 

Et on expédia la commande

Vers un resto d' la côte normande,

Mais la commande fit des ravages

En forniquant tout le voyage !

  

Enfin c' est dans la marinière

Sans faire davantage de manière

Qu on scella à la table huit

L' union de la moule et d' la frite :

 

On les noya dans du vin blanc,

Et comme dessert y avait du flan !

 

 

__________

 

Dans du fer blanc

 

Il était d'acier mon sourire,

Mes armes n'étaient pas forgées

Dans du fer blanc,

Mais la destinée d’un empire

Est de voir l’ héraldique figée

Dans du fer blanc !

 

 

J' étais artiste et mes statues

Étaient sculptées en quelque sorte

Dans du fer blanc,

Elles n' étaient pas de bronze vêtues

Car on moule les amours mortes

Dans du fer blanc !

 

 

Sacrifiant à mes certitudes,

Je compressais les mots doux

Dans du fer blanc

Et débordant de mansuétude,

Je faisais sertir des bijoux

Dans du fer blanc !

 

 

Peu m' importait les conséquences

Si je remisais les murmures

Dans du fer blanc 

Mais je me rends à l' évidence :

Elle était taillée mon armure

Dans du fer blanc !

 

 

Pensant revivre en d’autres guerres

J’ai trinqué avec les soudards

Dans du fer blanc,

Mais constatant comme naguère

Qu’on fabriquait pas les pétards

Dans du fer blanc,

 

 

Qu’on allongeait très bien aussi

Les hommes en miettes dans les boîtes

De sapin blanc, 

J’ai écouté mon cœur farci

S’éteindre dessous mes mains moites,

Et  le ciel blanc.

 

__________

 

 

Un rocher 

 

Stoïque en regard des saisons

Obstinée telle la rumeur

Heurtant doucement l’horizon

- Un peu en dessous de douze heures -

Une ombre informe où viennent battre

Bercées de fous, battues de houle

Des vagues de filets verdâtres :

Une masse que des pieds foulent,

 

Par grappes de cinq ou six pêcheurs

Comme bourreaux sur l’échafaud,

Comme autant de frères prêcheurs

Souillés pas l’incroyant gerfaut,

Lorsque l’emprise où sont ses flancs

S’est retirée et vogue au large,

Découvrant, blancs ou gris, des bancs

De sable qui prolongent la plage.

 

Une masse informe qui dure

Autant d’années qu’un moribond

Sans cesse au point de la rupture

- Oui, mais le cœur est encore bon ! -

Avec ses résidus d’étoupes

Dessous ses cent mille coquillages

Qui séduisirent les chaloupes,

Les bouteilles des vieux naufrages,

 

Emmitouflée dans son écume,

Ciselée à grands coups d’embruns,

Cette masse que le vent hume

De lendemains en lendemains,

Rigide comme un évêché,

Plus implacable qu’un pensum

Voit sur la grève s’échouer

Les rêves que le temps assomme...

 

____________

 

    Les drapeaux (on n'est pas rendus!)

 

Je vais reprendre une bière

sous ce soleil démocrate

où la misère, quatre à quatre,

grimpe les marches de la colère,

et regarder passer les filles

dans cette brume où je m'éclipse

en attendant l'apocalypse

que les va-t-en-guerre balbutient.

 

Les drapeaux, même bien arrosés,

ça suffit-y à griser

le chaland moyen qui s'étiole

entre un comptoir et sa bagnole ?

 

Autant s'accouder à la fenêtre

pour mieux savourer la paresse

et ses danaïdes promesses

à grands coups de "ni dieu, ni maitre",

autant regarder dans la rue

défiler les idées qui votent,

et, d'entre elles, les plus patriotes

et les drapeaux qu'elles montent aux nues.

 

Les drapeaux, même bien arrosés,

ça suffit-y à rassasier

le chaland moyen qui s'agite

dans l'panier d'crabes nationaliste ?

 

Autant, autant ne pas s'en faire

en cet empire névralgique,

on a beau boire de l'utopique,

on ira faire un tour aux fers :

alors, installés à fond d'cale,

avec nos mains tendues en vain,

on pourra  jouer les devins

et prévoir la prochaine escale :

 

 

 

même bien arrosés, les drapeaux,

ça n'pousse finalement pas bien haut,

et quand l'chaland prend sur la gueule

la hampe, ben mon vieux, il s'affole !

 

 

Mais c'est en général trop tard,

quand un drapeau bien arrosé

ressemble à une croix embrasée,

on devient tous nègres tôt où tard :

on apprendra à chanter l'blues

dans le quartet Dupont-Lajoie,

à trop croire qu'on avait le choix

dans le sud les urnes sentent la bouse !

 

Même nourris à la chair à canons,

un drapeau ça reste au fronton,

et quand l'chaland le met en berne

ailleurs qu'au fin fond d'une benne,

 

ben, mon vieux, on n'est pas rendu !

 

_______________

 

 

C'EST MAT!

 

Cet oeil incrédule qui se fige,

écarquillé de tous ses doutes,

ce bourgeon mort-né sur sa tige,

sentant poindre enfin sa déroute :

une sombre histoire de fous

que cette vague reine itinérante,

chancelante dans le flou

d'une cavalcade abérrante,

 

Ce frémissement de la narine

jaugeant, tour à tour, l'inutile

et l'état des lieux de sa ruine,

trahit le verdict imbécile:

la faute à ce soldat grotesque

affalé comme un coup du sort,

contraire aux lois de soldatesque,

déjà soumis à son vainqueur,

 

Cette main déchue et qui plie,

enserrant son maigre butin,

moite et fébrile sous l'agonie,

aux doigts devenus incertains,

laissant s'approcher, téméraire,

sa soeur près de l'agonisant,

-mais les espoirs, d'eux-mêmes, s'enterrent

sous l' inventaire des gisants :

                                      

                                             c'est mat !

 

 

_______________________

 

Paquita oune poquito             

 

Dépouis lé temps qué paco             

regardait passer Paquita                 

lé long des roues de Mexico,            

où elle marchait à pétits pas,            

 

les yeux dé Paco sé battaient            

et lé plous fort avait lé droit             

dé la regarder en premier,                 

la  muy esplendida chica                  

 

qui proménait son panier                  

en aïllitant ses pétits bras                  

en avançant ses pétits pieds,              

Paco sé pétait tout bas:                  

 

y'aime Paquita oune poquito, _      

mais yé souis pas _courageoso,               

yé peux pas louis dire dans l'oreille :         

yé sais pas parler aux demoiselles !           

 

Lé malhaureux sé tortourait,

il avait des maux d'estomac

et en magnyant ses tortillas,

Paco, lé pauvre, sé tortillait

 

pendant cé temps là, Paquita,

rencontrait sous oune sombrero

oune roméo dé cinéma,

imbécile mais grand et costaud

 

et Paco, lé pauvré Paco

fou de douleur, sé résigna

à être oune ennamorado

qui n'a pas dé chance ici bas

 

Y' aime Paquita oune poquito 

mais Paquita n'aime pas Paco,

et yé peux pas louis dire à l'oreille :

yé sais pas parler aux demoiselles !

 

 

et en buvant sa téquilla,

Paco pleurait sur son destin :

un soir qu'il disait: "ah! là ! là !"

en torturant ses intestins,

 

oune yolie fille fit l'premier pas

et lui murmura "yé vous aime !

Yé vous aime mais vous l'savez pas,

dépouis des yours et des semaines !"

 

Paco, lé pauvre, fut tout sourpris,

et regarda la yolie fille,

oune yolie fille qué se llama

dou yoli prénom dé Maria...

 

 

y'aime Paquita oune poquito 

mais yé souis pas estupido :

y faut qué yé mé fasse oune raizonne,

yé vais quand même pas rater oune occazione!

 

Alors Paco sé maria

avec la yolie Maria

mais quand elle vit ça, Paquita,

soudain, ben, Paquita tiqua!

 

Car Paquita aimait Paco,

dépouis des yours et des semaines

mais comme lé malhaureux Paco

n'osait pas lui dire: "yé vous aime !"

 

et né regardait Paquita

qué quand elle né régardait pas,

Paquita, la pauvre, épousa,

cé Roméo dé cinéma !

 

Y'aime Paco, tanto mucho,

Paco es oune beau muchacho,

 oune muchacho qué me gusta

mais yé sais pas parler aux gars...

 

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Les coquillages

 

De grain de sable en grain de sable,

les coquillages,

ça regarde passer les crabes,

les coquillages,

en rêvant de dev’nir poisson

et de nager vers l’horizon

 

Ca ne sort pas de sa coquille,

les coquillages,

c’est bien trop timide pour les filles,

les coquillages,

à la rigueur ça lève le verre

à la santé d’encore une bière

 

Ca reste amarré au comptoir,

les coquillages,

à siroter des idées noires,

les coquillages,

à la rigueur ça lève le coeur

pour regarder passer les heures

 

Parfois ça se laisse ramasser,

les coquillages,

ça se laisse mettre dans un panier,

les coquillages,

mais ça lève quand même la tête

pour regarder passer les mouettes,

 

Et de ressacs en marées basses,

les coquillages,

ça s’entiche de l’île d’en face,

les coquillages,

et ça compte sur le bout des algues

combien qu’il leur reste de vagues

à faire naufrage.  

 

      

                                          

                                                      _______________

 

        Feignasse song


        Moi mes lauriers sont bien modestes,

        ils n'ont jamais poussé bien haut

        mais pour ce qui est du confort

       y a rien d'meilleur

        à l'heure sacrée de la sieste,

        quand il fait soif, quand il fait beau,   

        je me laisse tomber comme un sac

        dans mon hamac.

 

        Et quand les graines de l'effort

        pointent leur nez dans leurs sillons,

        je m'abstiens -j'suis pas jardinier-

        de les biner :

        j'appelle Morphée en renfort

        et, à nous deux, nous combattons

        l'horrible menace qui me guette

        dans ma retraite.

 

 

        Et j'avoue, toute honte bue,

        que je m'installe autant qu'possible

        à proximité de l'usine

        ce qui chagrine

         l es forçats d'l'effort continu

        qui me traitent bêtement de nuisible :

        qu'y puis-je si les voir travailler

        ça m'fait bailler ?

 

        Et je vis comme un milliardaire,

         je suis plus riche qu'un Emir

        car je possède en ce bas monde

        des tas d'secondes.

        Des tas d'secondes à ne rien faire

        et rien en banque pour m'en servir,

        alors je vis à moindre frais

        sans trop d'regrets...

 

                   _____________               

 

Chanson de l’escargot de Bourgogne 

 

 

Regardez-le passer, le fier et beau troupeau

Lorsqu’Octobre nous arrive, avec ses oripeaux,

Écoutez le doux chant, sous son manteau d’automne

Du peuple mystérieux des escargots d’Bourgogne.

 

 

Il nous arrive de loin, porteur de tant d’espoir,

En caravanes longues qui campent tout le soir

Et, Dieu ! Qu’il est mignon, l’orgueilleux p’tit bonhomme,

Pour un peu j’l’embrasserais, l’escargot de Bourgogne.

 

 

L’horizon qui s’enfuit, sous la lune qui revient

Fait les cœurs nostalgiques, et chacun se souvient

Du temps joli qu’était celui d’avant les hommes

Lorsque vivait en paix l’escargot de Bourgogne.

 

 

Mais il y a danger à vivre sous les salades

Et il lui faut reprendre la dure vie de nomade.

Alors, le souffle long du clairon sonne

L’heure du départ pour l'escargot de Bourgogne.

 

 

Et, vibrant à l’appel de nouvelles aventures,

Le convoi s’ébranle en un cliquetis d’armures.

Un peu las d’arpenter, il envie les cigognes,

Mais il est courageux, l’escargot de Bourgogne...

 

 

___________

 

 

Ballade des suffisants

 

Pour héros préférez, au doux nom de Bébert
Horace, Ruy kèkchose ou bien encor Roland.
Quant à la Muse il faut qu'elle exhale la myrrhe
Et, drapée de pétales, elle attise les sens
Car c’est susciter l'ire des cuistres Cerbère
Que d’oser bravement et d'un naïf allant
-Plutôt que de Césars, de Prophètes ou d' Émirs-
Conter feu les amours de vos grandes vacances!
Faites-vous donc abscons, et carrément grotesques :
Pour art poétique, donnez dans l'Union Libre .
L’effet est garanti et la critique vibre,
La moindre platitude a une allure dantesque !

 

C'est qu'à sa morgue il faut de plus nobles motifs :
Le cœur de quelque infante ou l'effroi d'un dandy :
Tout ce qu'on voudra bien, pourvu qu'y figurât
De l'université la pompeuse estampille !
Ô l'imparfait lettré, le scribouilleur fautif,
Qui, sans un régicide ou un crâne brandi,
Acheva une œuvre qui jamais n'augura
La moindre des saveurs et demeure broutille !
La syntaxe est triviale et le propos vulgaire
S'ils n'ont pour vocation de nourrir une glose :
Il faut être oublieux de jadis et naguère,
Ne plus se soucier d'aller voir si la rose…


 Birbes homologués, tant d’Augustes bourriques
Qui vont, dodelinant une hure chenue,
Saouler d'exégèses Bardamu et Vingtras,
Manier Rabelais, certes avec des pincettes,
Transmuter la lecture en truc amphigourique
Qu'on martèle en chaire comme vérité nue :
" Ôtons bonnet rouge, poire et tout le fatras,
Bref du dictionnaire l'excédent qui l'infeste ! "
Est-elle gravée enfin, au fronton de leur huis,
Leur suffisance idoine: " qu'en cette heure, en ce jour
Le populo le sache l'élite pense à lui :
Qu'il s'abreuve d'eau rose, ça lui plaira toujours " ?

 

Et c'est avoir beau jeu, d' un élan suranné,
Qu' amalgamer le bruit des scansions de benêts
Éructant en gros plan, exhibant des pétoires
Et les trouvailles issues des jactances glanées
Aux étals des marchés, sur le zinc des comptoirs.

_________

 

   LA RELEVE

 

En cet océan de l'ennui

grossi au ruisseau de nos doutes,

notre alambic s'épanouit

à distiller les dernières gouttes

de cette obsession prosélyte

jamais affranchie de ses mythes :

                                                

                                                  la relève !

 

Alors aux grands prés de l'angoisse,

s'en vient paître par habitude

cette négation de la poisse

des ovins de la certitude :

chacun machine dans sa chacune

en croyant décrocher la lune:

 

                                                  la relève !

 

Et dans ce piège de l'alcôve

où le rut entre en purgatoire,

on voit s'étioler de grands fauves

dans une savane de hasards,

quelque tumeur s'en vient mûrir

comme une sentence tout en sourire :

 

                                                     la relève !

 

Le temps peut bien faire son office

en alignant ses évidences,

rien ne conjure la matrice,

et ses oeillères tout en constance,

oubliant que vers l'horizon,

plane déjà une oraison :

 

                                                    la relève !